Article publié en décembre 2023

La loi Lemoine est une réelle mesure pour le pouvoir d’achat

Expertise secteur assurantiel
Temps de lecture : 2min
Mise en œuvre depuis le 1er septembre 2022, la loi Lemoine marque une avancée significative pour les droits des emprunteurs. Qu’en est-il des assureurs et courtiers ? Entretien avec Marina Vivargent, Directrice technique et Data chez Groupe Magnolia, courtier grossiste et comparateur n°1 en assurance-crédit en ligne.

En quoi la loi Lemoine constitue-t-elle une avancée majeure pour les emprunteurs ?

La loi Lemoine  a simplifié le changement d’assurance. La résiliation du contrat à tout moment, qui donne l’opportunité de changer d’assurance de prêt immobilier rapidement et simplement, était la mesure phare de la réforme. Elle apparaît aujourd’hui clairement comme une aubaine pour les consommateurs qui peuvent faire jouer la concurrence sur leur assurance. Dans un contexte d’inflation et de baisse de pouvoir d’achat, cette réforme est sortie au bon moment car elle permet d’économiser des milliers d’euros sur la durée restante de son prêt. Mais beaucoup de personnes ignorent encore cette mesure malgré l’obligation d’information annuelle faite aux banques. Selon une étude que nous avons réalisée, 66% des emprunteurs ignorent qu’ils peuvent changer à tout moment et seulement un peu plus de 50% savent qu’ils peuvent choisir une assurance concurrente de celle du prêteur.

Avez-vous pu mesurer l’impact de la réforme sur votre activité ?

Nous avons vu nos demandes bondir de +300% dans les trois mois qui ont suivi l’entrée en vigueur de la réforme. Comme la loi était attendue, elle a été largement relayée par les distributeurs et par les médias et les clients ont afflué en masse sur notre comparateur en ligne. Dans notre premier bilan publié le 1er septembre 2023, nous estimons que notre activité est désormais portée à 80% par les changements de contrats contre seulement 20% par des nouveaux prêts. Nous avons également constaté que les emprunteurs n’hésitaient pas à effectuer une demande de changement dès les premiers mois du prêt. Ainsi, grâce aux 250 000 demandes de devis effectuées sur notre comparateur depuis le 1ᵉʳ juin 2022, nous estimons que nous avons fait économiser plus de 300 millions d’euros à l'ensemble de nos clients. En permettant à chaque emprunteur de garder le libre choix du contrat et de pouvoir faire jouer la concurrence pour trouver l’assurance la plus intéressante, la Loi Lemoine constitue une réelle mesure en faveur du pouvoir d’achat.

Quelles sont les conséquences de cette réforme sur votre organisation en interne, sur la gestion des contrats notamment ?

La loi a été déployée en plusieurs temps à partir de sa promulgation au Journal Officiel en février 2022 jusqu’à son entrée en vigueur en septembre. Ainsi, la mesure relative à la disparition du questionnaire de santé a été effective à partir de juin. En interne, nous nous sommes rapidement organisés en « mode projet » pour mettre en conformité nos produits et proposer des parcours conformes. Nous avons eu 4 mois intenses pour revoir nos process de gestion et solidifier nos outils. C’est ainsi que dès septembre, nous avons pu absorber l’afflux de demandes sans que cela ait d’impact sur l’organisation en interne et sur notre objectif de maintenir le même niveau de délai et de qualité de service.

Quels sont les impacts tarifaires de la loi Lemoine ? Avez-vous suffisamment de recul pour en avoir une vision claire ?

Il est encore trop tôt pour établir un bilan précis. Les assureurs ont dû, dans un premier temps, modéliser l’impact de la suppression du questionnaire médical avec une marge de prudence, car les données du segment dit Lemoine, c’est-à-dire non soumis à sélection médicale, n’existaient pas. Les revalorisations tarifaires n’ont porté que sur ce segment-là et encore dans une moindre mesure. La prise de risque aura, je pense, un impact mesuré sur la qualité globale du portefeuille et leurs marges au final. De manière générale, les courtiers ont voulu plutôt revoir leurs tarifs à la baisse pour être plus compétitifs et retenir leurs clients. Aujourd’hui, les assureurs commencent à affiner leurs majorations en opérant une différenciation par catégories socioprofessionnelles, âge, risque lié au tabac, etc. Je pense que dans 5 ou 6 ans, les portefeuilles auront une profondeur suffisamment intéressante pour pouvoir établir une prévision plus fine. Nous aurons une meilleure vision du risque et c’est là que nous saurons réellement le coût de cette réforme pour les assureurs. S’ils ont été trop prudents, ce qui serait plutôt la logique, les assurés bénéficieront de tarifs segmentés, au plus juste.

La loi a-t-elle entraîné des effets d’opportunité chez les assurés comme chez les assureurs et courtiers ?

La fin du questionnaire de santé n’a pas créé d’effets d’opportunité anormaux chez les assurés, notamment chez ceux qui se savaient malades. C’était pourtant une crainte des assureurs de substitution même si des pares-feux ont été mis pour éviter toute dérive. En revanche, nous avons observé chez nos partenaires courtiers une forte hausse des dossiers de substitution. Là, il y a eu clairement un effet d’aubaine. L’assurance emprunteur est clairement devenue un revenu en plus pour les courtiers, ce qui n’est pas au départ leur cœur de métier.

picto devenez partenaire

DEVENEZ PARTENAIRE

Intéressé par nos offres et services ?

Prenez rendez-vous avec un de nos conseillers UNMI