Article publié en juillet 2022

Loi Lemoine : plus d’équité pour les emprunteurs ; plus de pouvoir d’achat ?

Expertise secteur assurantiel
C’est une bonne nouvelle pour les personnes souhaitant souscrire un prêt immobilier. Depuis le 1er juin 2022, les modalités de l’assurance emprunteur sont assouplies sur trois points essentiels. Décryptage …

Votée par le Parlement le 17 février 2022, la Loi Lemoine doit permettre « un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l'assurance emprunteur ». En résumé, cette réforme vise à rendre du pouvoir d'achat aux consommateurs en faisant baisser le coût de l'assurance emprunteur.

Changer d’assurance sera plus facile

Les emprunteurs pourront désormais mettre fin à leur contrat d’assurance sans frais et à tout moment, et non plus seulement à sa date anniversaire. Cette disposition est entrée en vigueur le 1er juin 2022 pour les offres de prêts émises à compter de cette date, et à partir du 1er septembre pour les anciens contrats. En cas de résiliation, le nouveau contrat choisi par l’emprunteur devra toutefois présenter une équivalence de garanties à celui du contrat résilié. C’est la banque elle-même qui se chargera de vérifier cette équivalence. Si le contrat répond bien à ses exigences en la matière, elle ne pourra pas refuser le changement d’assurance de prêt.

Pour Patrick Ratta, Directeur du Développement à l’UNMI, cette mesure vise l’équilibre d’un marché inégalement réparti entre les assurances de groupe, qui représentent 88% du marché, et les assurances individuelles (12%). « Cette loi est le prolongement de différentes dispositions réglementaires antérieures, notamment la loi Lagarde de 2010 et la loi Hamon de 2014 qui allaient dans le sens du libre choix de l’assurance de prêt par l’emprunteur. La loi Bourquin de 2018 amorçait déjà une révolution du marché de l’assurance emprunteur mais il n’y a pas eu de grandes évolutions. C’est pourquoi je ne suis pas certain que la loi Lemoine ait un impact fort sur la répartition actuelle du marché », commente-t-il.

En revanche, il est possible que l’emprunteur puisse réaliser une économie substantielle en faisant jouer la concurrence entre les assureurs. Le fait de souscrire une assurance emprunteur auprès d’une compagnie concurrente permettrait d’économiser sur le coût du crédit. « Passer d’une assurance emprunteur de groupe à une assurance individuelle permettrait de réaliser une économie substantielle de l’ordre de 5 000 à 10 000 euros », précise Patrick Ratta. L’assurance groupe est en effet basée sur un principe de mutualisation des risques, alors que les assurances individuelles proposent un tarif personnalisé et adapté à la situation personnelle et professionnelle de l’emprunteur. Avec une assurance externe, un emprunteur peut plus facilement faire baisser le tarif de sa couverture, et optimiser le coût total de son prêt immobilier, surtout s’il est jeune et en bonne santé.

Le « droit à l'oubli » est étendu

Le « droit à l’oubli » permet actuellement aux anciens malades d’un cancer de ne plus avoir à déclarer leur maladie à leur assureur 10 ans après la fin de leur protocole thérapeutique. Avec la loi Lemoine, ils n’auront plus à déclarer leur maladie à l’assureur 5 ans après la fin de leur protocole thérapeutique. Cette mesure, élargie aux personnes ayant souffert d’une hépatite C, était vivement réclamée par les associations de malades. « Elle aura un impact positif pour les personnes concernées qui pourront avoir un accès plus simple à l’assurance emprunteur », se félicite Patrick Ratta.

La fin du questionnaire de santé

Adressé par l’assureur à l’emprunteur, ce document a pour but d’évaluer le risque de survenue d’un des sinistres garantis par le contrat. En cas d’antécédents médicaux ou de facteurs de risques importants, certains emprunteurs pouvaient rencontrer des difficultés pour obtenir leur assurance de prêt. A partir du 1er juin, ce questionnaire sera supprimé pour les prêts immobiliers inférieurs à 200 000 euros par personne (soit 400 000 euros pour un couple) et dont le remboursement s’achève avant le 60ème anniversaire de l'emprunteur. Là encore, la suppression du questionnaire médical permettra aux anciens malades d’accéder à l’assurance de prêt sans se voir appliquer des tarifs prohibitifs du fait des exclusions de garanties et surprimes. « Permettre un accès plus simple au crédit en supprimant la sélection médicale aura un impact fort en termes de justice sociale. En revanche, je crains une augmentation de tarifs en contre-coup. D’ailleurs, tous les assureurs sont en train de revoir leur copie en ce sens », souligne Patrick Ratta.

Une mesure « booster » de pouvoir d’achat ?

Non obligatoire au sens légal du terme, l’assurance emprunteur est exigée par toutes les banques dans le cadre d’un crédit immobilier. Si elle permet de couvrir toute défaillance de l’emprunteur liée à un problème de santé, elle représente le coût le plus important du financement, après les intérêts du crédit immobilier. L’objectif de la loi Lemoine est donc d’en faire baisser le coût par le jeu de la concurrence. Évalué à environ 10 milliards d'euros de cotisations par an auprès de 7 millions d'emprunteurs immobiliers, le marché de l'assurance emprunteur est à ce jour historiquement dominé par les filiales d'assurance des banques qui détiennent 88% de parts de marché. En l’ouvrant plus facilement à la concurrence, l'UFC Que Choisir estime que la loi Lemoine pourrait permettre un gain de pouvoir d'achat de 550 millions d'euros par an pour l'ensemble des emprunteurs…

Sources

https://www.france24.com/https://www.quechoisir.org/https://www.latribune.fr/https://www.quechoisir.org/

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