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Concentration des mutuelles : rencontre avec Thierry Beaudet, président de la FNMF

10/08/2021 Expertise

Constituée en 17 unions régionales, la Fédération nationale de la Mutualité Française (FNMF) défend les intérêts collectifs de 540 mutuelles adhérentes dont 266 mutuelles de santé.

En quoi, face au mouvement de concentration observé depuis les années 2000, la mission des mutuelles est-elle plus que jamais essentielle ? Comment, concrètement, la mettez-vous en œuvre ?

Thierry Beaudet : Depuis son origine, Mutualité rime avec proximité. Notre démocratie s’adapte en permanence pour répondre aux nouveaux désirs de s’investir et de militer. Certes, des mutuelles se rapprochent sous la pression de la concurrence et l’évolution permanente de la régulation et de la réglementation européenne, mais ces mouvements sont impulsés aussi par la volonté de trouver les moyens d’innover au bénéfice de tous les Français. Ainsi, en se concentrant, les mutuelles répondent à la concurrence forcée dans laquelle le secteur est plongé, considérant qu’elles le font pour se développer, innover et répondre au mieux aux besoins de leurs adhérents. Dans tous les cas, ces mutuelles s’attachent à gagner en taille sans perdre en proximité.

En 2018, vous avez lancé une vaste campagne de communication baptisée « Votre mutuelle est-elle une vraie mutuelle ? ». Pourquoi l’avoir fait ? Quels étaient ses objectifs ? Deux ans plus tard, ses effets sont-ils mesurables ?

T. B. : Cette campagne redonne du sens au mot « mutuelle », trop souvent utilisé à tort pour désigner toute forme de complémentaire santé. Nous démontrons au quotidien nos valeurs en tant qu’acteurs de protection sociale et compagnons de vie des adhérents. Nos bénévoles, militants et salariés se sont largement approprié cette campagne qui a eu des retombées importantes dans le grand public. Nous l’avons depuis prolongée avec des exemples réels incarnant nos valeurs et nos métiers. Avec cette campagne, notre fédération est pleinement dans son rôle auprès de toutes les mutuelles, quelle que soit leur taille. Au travers de ses différents métiers, la Fédération poursuit ainsi sa mission : accroître et faire évoluer la protection sociale des français. Cela passe notamment par la défense des spécificités du code de la mutualité, y compris auprès du superviseur. Le régulateur, l’ACPR, vise également la préservation des  intérêts des adhérents. Mais si les finalités se recoupent, la manière d’y répondre est souvent différente. Pour notre part, nous sommes convaincus que le modèle mutualiste permet l’alignement des intérêts entre l’assureur et l’assuré. Toutes nos démarches, qu’elles soient menées auprès du Ministère de la Santé sur les évolutions du Code de la mutualité, auprès du superviseur européen ou encore de l’ACPR, répondent à l’objectif de promouvoir l’alignement de ces intérêts et du modèle mutualiste. Car les vraies mutuelles et leur mode de gouvernance sont la meilleure protection pour la complémentaire santé des Français.
La FNMF défend aussi l’application du principe de proportionnalité, qui permet de répondre aux préoccupations et contraintes de toutes les mutuelles, quelle que soit leur taille. Si une mutuelle estime que pour conserver le lien avec ses adhérents, elle doit rester une mutuelle indépendante, non adossée, territoriale, il nous semble évident que le superviseur doit respecter sa décision, qui est aussi celle des adhérents. Cela implique donc d’appliquer la proportionnalité dans la régulation qui lui est imposée.

Les valeurs mutualistes d’hier sont-elles encore celles d’aujourd’hui ? Si oui, pourquoi le sont-elles toujours ? Si non, qu’est ce qui a changé ?

T. B. : Mettre l’humain au cœur du modèle mutualiste est un élément de continuité qui guide nos actions et nos innovations. Cette priorité fonde le soin mutuel, lorsque chacun se préoccupe de chacun, la société de chacun et chacun de la société. Je suis convaincu de la modernité de ce modèle, de son utilité dans une société fracturée qui a plus que jamais besoin de refabriquer du commun, de retisser des liens. Bien sûr, nous cherchons à « moderniser », à mettre au goût du jour nos modes d’organisation et de fonctionnement, afin qu’ils correspondent à la façon dont les français veulent vivre la mutualité aujourd’hui. Dans le contexte actuel, les valeurs mutualistes connaissent un regain d’intérêt avec des modes de mobilisation qui évoluent, en particulier de la part de la jeunesse.

La sauvegarde des valeurs mutualistes représente-t-elle, selon vous, un atout concurrentiel ?

T. B. : Dans une économie financiarisée et  soumise aux exigences de rentabilité, les mutuelles ne soignent pas leurs actionnaires mais leurs adhérents. C’est une différence essentielle. Le mutualisme doit conserver son identité, au bénéfice des français et de la solidarité. Il doit en permanence regarder de l’avant et innover. Et probablement viser à davantage prévenir plutôt que réparer, davantage éviter la création des inégalités sociales que les corriger. L’accompagnement  de l’adhérent va bien au-delà du remboursement de sa prestation santé. En prévention, bien sûr, mais également dans les moments difficiles de sa vie, les mutuelles sont là pour lui proposer des services pour mieux vivre et aussi l’accompagner dans sa compréhension du système de santé qui est riche mais aussi extrêmement complexe.

 


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